Pneumologie
L’exposition professionnelle aux pesticides est liée à un risque accru de développer une bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO), confirme une étude britannique publiée dans la revue Thorax. Ce qui expliquerait en partie la surincidence de cette maladie pulmonaire chez les agriculteurs.
Lymphome non hodgkinien, myélome multiple, cancer de la prostate, maladie de Parkinson, troubles cognitifs, mais aussi bronchite chronique et BPCO… publiée en juin 2021, une expertise française de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) concluait qu’il existait une « présomption forte » d’un lien entre exposition aux pesticides et ces maladies.
Selon les experts de l’Inserm, « le tabac est le principal facteur de risque de la BPCO puisque 80% des cas sont attribuables au tabagisme actif ou passif. Néanmoins, d’autres facteurs environnementaux ont été identifiés tels que la pollution de l’air, les expositions professionnelles à certaines substances chimiques (poussière de charbon, silice, poussières organiques…) ou sont suspectés, tels que l’exposition aux pesticides ».
Lors de travaux publiés en 2019, l’équipe de Paul Cullinan, du National Heart and Lung Institute (Imperial College, Londres), avait révélé un risque de BPCO accru jusqu’à +76% chez les agriculteurs, par rapport à la population générale. Un phénomène que leur nouvelle étude, publiée dans Thorax, lie très clairement à l’usage de pesticides. Avec 94.514 participants analysés, en l’occurrence ceux de la UK Bank Biocohort, il s’agit de l’étude la plus large menée à ce jour à ce sujet.
Parmi ces personnes, pour lesquelles les chercheurs disposaient d’un historique professionnel complet et de données spirométriques, 8% étaient atteintes de BPCO. Les résultats révèlent un lien statistiquement significatif entre exposition professionnelle aux pesticides et BPCO. Le risque est accru de 13% chez les personnes déclarant avoir été exposées à ces substances, voire de 32% chez celles ayant subi une exposition élevée.
De plus, l’association demeure après que les chercheurs ont écarté d’autres facteurs de risque bien connus : chez les non-asthmatiques, le risque est accru de 17% chez les utilisateurs professionnels de pesticides (voire +26% en cas d’exposition élevée). Chez les personnes n’ayant jamais fumé, la hausse est de respectivement +29% et +39%.
Les chercheurs ne mettent pas à jour d’association entre l’exposition à d’autres polluants liés à la BPCO, dont les fumées, ou les poussières minérales et organiques. Ce qu’ils expliquent par une faible représentation des professionnels fortement exposés à ces polluants au sein de la UK Biobank Cohort.
Quant aux pesticides potentiellement impliqués dans la BPCO, des travaux menés sur la cohorte américaine AHS ont suggéré un lien avec plusieurs agents, en particulier les insecticides de la famille des composés organophosphorés. Parmi eux, le chlorpyriphos, le diazinon, le dichlorvos, le parathion et le malathion -seul ce dernier demeure autorisé dans l’Union européenne.
Ces inhibiteurs de l’acétylcholinestérase (AChE) pourraient avoir des effets bronchoconstricteurs à de faibles concentrations, inférieures à celles auxquels ils inactivent leur enzyme cible. D’autres familles de pesticides pourraient aussi altérer la santé respiratoire via d’autres mécanismes, dont le stress oxydant, l’inflammation et la toxicité mitochondriale.