- par Jean-Yves Hindlet
L’optimisme est régulièrement associé à des niveaux de bien-être plus élevés. Une étude récemment publiée vient de montrer que le fait d’être optimiste favorise également une plus grande longévité (1).
Les chercheurs ont suivi 159.255 femmes âgées de 50 à 79 ans appartenant à la cohorte de la Women’s Health Initiative sur une période de 26 ans afin d’étudier la relation entre optimisme, longévité et longévité exceptionnelle (≥ 90 ans). Au lancement du protocole, les participantes ont rempli des questionnaires d’auto-évaluation de l’optimisme et les résultats ont été rangés en quartiles. En 2019, les chercheurs ont recontacté les participantes toujours en vie et ont examiné la longévité de celles qui étaient décédées. Après ajustement pour les variables dont on sait qu’elles influencent positivement la longévité (niveau d’éducation, statut économique, origine ethnique, antécédents de dépression ou de maladie chronique), le quartile d’optimisme le plus élevé par rapport au plus bas était corrélé à une durée de vie plus longue de 5,4%. En outre, les participantes du quartile d’optimisme le plus élevé avaient une plus grande probabilité d’atteindre une longévité exceptionnelle.
Des résultats similaires avaient été précédemment rapportés pour des cohortes mêlant hommes et femmes [voir (2) par ex.]. Le sexe n’est donc pas l’explication, mais quelle est-elle?
Il a été montré que l’optimisme était associé à l’adoption de comportements sains (alimentation, activité physique régulière, abstention tabagique…), qui contribuent à prévenir la survenue de maladies potentiellement mortelles, telles les maladies cardiovasculaires, le diabète ou le cancer. Koga HK, et al. (1) ont estimé que le mode de vie expliquait 24% de la relation entre optimisme et longévité. D’autres facteurs interviennent donc…
La façon de gérer le stress pourrait jouer un rôle. D’une part, on sait que le stress est associé à des affections influant sur l’espérance de vie, comme, de nouveau, les maladies cardiovasculaires. D’autre part, l’optimisme serait associé à la mise en œuvre de meilleures stratégies d’adaptation au stress [selon la méta-analyse (3)]. L’optimisme dispositionnel s’y est avéré être positivement associé aux stratégies d’adaptation d’approche visant à éliminer, réduire ou gérer les facteurs de stress ou les émotions et négativement associé aux stratégies d’adaptation d’évitement visant à ignorer, éviter ou se soustraire des facteurs de stress ou des émotions. Autrement dit, les optimistes ont tendance à attaquer de front les situations stressantes, à les considérer de telle manière que le niveau de stress diminue et à mieux s’adapter.
Évidemment, tout le monde n’est pas de nature à voir la bouteille à moitié pleine. On sait que ce trait est déterminé par des facteurs génétiques [qui expliqueraient jusqu’à la moitié de la variance de l’optimisme et de sa relation avec la santé (4)] et par le déroulement de la petite enfance, notamment au travers de la sécurité de l’attachement [reliée à l’optimisme dispositionnel par le biais des perceptions individuelles du contrôle interne: les individus ayant un plus grand locus contrôle interne ont tendance à percevoir les événements comme dépendant de leur propre comportement, au contraire des personnes ayant un locus de contrôle externe, qui ont tendance à considérer que les résultats sont le fruit de causes extérieures à leur propre comportement, liées à l’action d’autres personnes, du hasard ou de la chance (5)].
Fort heureusement, l’optimisme n’est pas entièrement déterminé par notre hérédité et notre petite enfance et peut être développé grâce à un certain «travail» sur soi.
Ainsi que le décrit Fuchsia Sirois (Professor in Social & Health Psychology, Durham University) (6), une des meilleures techniques est celle du «meilleur moi possible» [Best possible self (7)], qui est un exercice de psychologie positive consistant à imaginer une version future de soi-même qui a atteint ses objectifs [positifs et raisonnables, dépendant de soi plutôt que des autres; pour les détails pratiques, voir (8) par ex.]. Prendre des mesures réalistes pour y parvenir ajoute une dimension supplémentaire. Selon Fuchsia Sirois, le simple fait de penser à des événements futurs positifs aide à stimuler l’optimisme.